Abandon de poste: La tête de aya Boun Malick mise à prix

Ça a tout l’air d’une mesure de représailles contre le Secrétaire général du Sytjust dont le syndicat est en grève depuis quelques semaines pour exiger l’application du protocole d’accord signé avec le gouvernement le 17 février 2018. D’après des sources dignes de foi, le premier président de la cour d’appel de Kaolack dont dépend le tribunal de grande instance de Fatick a adressé au Garde des Sceaux une lettre de dénonciation contre Aya Boun Malick Diop, greffier en service au tribunal de Fatick, pour abandon de poste.
D’après des sources proches du ministre Malick Sall, le syndicaliste passe plus de temps dans les médias à Dakar qu’à prendre des audiences à son poste d’affectation. Saisi par le président Ousmane Kane, le Garde des Sceaux a actionné sa garde rapprochée composée de Madame Aissé Gassama, magistrat chevronné, secrétaire général du ministère, du conseiller technique numéro 1 Yakham Lèye, de Abdoulaye Ndiaye, tout nouveau directeur des services judiciaires, ancien directeur du Cfj qui vient de boucler une mission de plusieurs années en Guinée où il participait à la formation des juges guinéens.
Et last but not least, le directeur de cabinet du ministre, Nasser Niane, ancien directeur de la Fonction publique et fonctionnaire international, récemment recyclé, pour préparer la guillotine. Dès qu’ils auront terminé leur dossier, une procédure disciplinaire sera engagée contre Aya Boun Malick Diop.
Seulement, dans un contexte de duel à fleurets mouchetés entre le Sytjust et la chancellerie, une telle mesure apparaît plus comme une mesure de représailles contre un syndicaliste rebelle et risque de radicaliser davantage et les travailleurs de la justice et la centrale syndicale à laquelle appartient le Sytjust. Qui plus est, elle présenterait le ministre sous les airs d’un homme belliqueux, un va-t-en-guerre. Il est clair qu’il ne s’agit pas de dédouaner le fonctionnaire qui devait être à son service pour justifier son salaire.
Mais il se trouve que ce n’est pas nouveau d’autant que peu de Sénégalais savent que Fatick est le lieu d’affectation de Aya Boun Malick Diop qui passe pour le syndicaliste le plus médiatisé ces dernières années. A cela, il faut aussi ajouter que la radiation d’un fonctionnaire relève d’un parcours de combattant à moins qu’elle n’ait des relents politiciens à l’image de celle d’Ousmane Sonko. En effet, dans une lettre circulaire numéro49 du 21 mai 1963, le Président Senghor définissait le cadre.
«J’ai l’honneur de vous rappeler qu’en abandonnant son poste, un fonctionnaire rompt de sa propre initiative le lien qui l’unit à l’Administration et sa place en dehors du champ d’application des lois et règlements édictés en vue de garantir l’exercice des droits inhérents à son emploi, ce qui autorise l’Administration à prononcer dans ce cas sa radiation des cadres sans accomplissement des formalités prescrites en matières disciplinaires», écrit-il en précisant :
« Il conviendra, préalablement à toute décision, d’adresser au fonctionnaire coupable d’abandon de poste une mise en demeure à laquelle il sera invité à fournir des explications, et informé des mesures auxquelles il s’expose en ne déférant pas à l’ordre de reprendre service ou de rejoindre le poste qui lui avait été assigné. A l’expiration du délai imparti dans la mise en demeure, le fonctionnaire sera exclu des cadres sans mise en jeu de la procédure disciplinaire si ce n’est toutefois que le conseil de discipline devra être consulté sur le seul point de l’opportunité de prononcer cette révocation avec ou sans suppression des droits à pension».
Aussi, ajoute le Président Senghor, il n’est pas nécessaire que soit long le délai en cause. Le maximum devra être de huit jours. En l’espèce, cela suppose qu’une mise en demeure ait été faite au syndicaliste par son chef de service.
Ce qui n’est visiblement pas le cas d’autant plus que le Syndicat est en grève. Joint au téléphone par L’As, le Secrétaire général du Sytjust déclare : «C’est vous qui me l’apprenez. Je suis focalisé sur le combat que nous sommes en train de mener pour le triomphe du droit et de la vérité. Le reste n’est que diversion.»